Fremont
Donya, jeune réfugiée afghane de 20 ans, travaille pour une fabrique de «fortune cookies» à San Francisco. Ancienne traductrice pour l’armée américaine en Afghanistan, elle a du mal à dormir et se sent seule. Sa routine est bouleversée lorsque son patron lui confie la rédaction des messages et prédictions. Son désir s’éveille et elle décide d’envoyer un message spécial dans un des biscuits en laissant le destin agir…
Générique
- Réalisation
- Babak Jalali
- Scénario
- Babak Jalali, Carolina Cavalli
- Production
- Marjaneh Moghimi, Sudnya Shroff, Rachael Fung, Laura Wagner, Chris Martin, George Rush
- Photographie
- Laura Valladao
- Montage
- Babak Jalali
- Musique
- Mahmoud Schricker
- Interprétation
- Anaita Wali Zada (Donya), Hilda Schmelling (Joanna), Jeremy Allen White (Daniel), Avis See-tho (Fan)
- Origine, année
- US 2023
- Durée
- 91 minutes
- Distribution
- Trigon-Film
- Âge recommandé
- 12
Citation
En écho aux promesses hasardeuses des «fortune cookies», le film se mue ainsi en méditation existentielle et universelle sur la quête du bonheur.
Le Courrier, 7.3.2024
Commentaires
Loin du drame social prenant pour toile de fond l’insertion des réfugiés ayant fui leur pays d’origine, Fremont dresse le portrait touchant, subtil et réjouissant d’une jeune femme mutique et douce, qui sans être atteinte d’un stress post-traumatique, ne parvient pas à trouver le sommeil, sans doute par culpabilité vis-à-vis de sa famille qui l’a reniée. Le monde du travail n’est pas perçu sous un angle critique, comme un espace physique et mental, oppressant et aliénant. Le cinéaste va même à rebours des représentations plaquées, filmant le travail comme un lieu monotone mais accueillant. Les salariés ont même l’air de s’ennuyer, d’accepter mécaniquement une routine. Les gestes sont lents, les corps souvent à l’arrêt, les discussions étranges. Le film baigne dans une atmosphère poétique un peu idyllique, hors de tout réalisme malgré un contexte pesant. [...] À travers la posture hiératique des comédiens, les dialogues perchés et la rigueur des cadrages, la mise en scène touche à l’épure. Loin de tourner à vide, cette esthétisation anachronique traduit le caractère placide et légèrement tourmenté de l’héroïne qui ne se sent pas à sa place sans y être mal. Elle l’exprime simplement au détour d’un échange, signifiant qu’elle aurait pu fuir en Allemagne, en France ou n’importe où dans le monde. Elle semble détachée de tout, absente de son environnement, s’interdisant de construire une nouvelle vie, positionnement lié au sentiment de culpabilité d’avoir fui ses proches.
Culturopoing.com, 6.12.2023
Commentaires
Dessiné dans les rondeurs de l’enfance, le visage que l’on voit occupant toute l’image et qui sera de quasi tous les plans délivre une douceur pleine de détermination. Cela tient, sans doute, au regard, direct et franc, qui l’illumine. Donya, réfugiée afghane de 21 ans, ancienne traductrice pour l’armée américaine et expatriée au retour au pouvoir des talibans, vit désormais à Fremont, en Californie. Elle y a trouvé un nouveau travail dans une petite fabrique familiale de fortune cookies (« biscuits à message ») tenue par un couple d’immigrés chinois. Le soir, elle dîne seule dans un petit restaurant de quartier, avant de retrouver son studio, où elle peine à s’endormir. À cet exil, source de nombreuses souffrances, le cinéaste ajoute néanmoins une puissance dont il se fait un devoir. Celui d’accorder force et volonté aux personnages de ses films, à l’inverse du caractère victimaire dont on affuble le plus souvent les déracinés. Donya porte ce flambeau, qui, malgré sa modestie, refuse de se laisser faire et sait ce qu’elle veut. Le film agit de même : la tristesse diffuse, sans cesse contrariée par des situations absurdes, une drōlerie pince-sans-rire irrésistible. Bien que routinière, la vie de Donya croise une galerie de personnages plus ou moins loufoques, sujets aux névroses, un vague à l’âme dont il est préférable de rire plutōt que de pleurer. Toute la politesse de Babak Jalali.
Le Monde, 6.12.2023
Filmographie
- 2005
- Heydar: An Afghan in Tehran (Kf/cm)
- 2009
- Frontier Blues
- 2016
- Radio Dreams
- 2018
- Land
- 2023
- Fremont
Récompenses
- 2023
- Karlovy Vary International Film Festival: Best Director
- 2023
- Independent Film Festival of Boston: Grand Jury Prize
- 2023
- Sun Valley Film Festival: One in a Million Award
- 2023
- Festival du film Américain de Deauville: Prix du Jury